photo : Hélène Roche |
Le week-end dernier, j'étais du côté d'Angoulême avec l'Association pour le développement des Sciences équines, dont je suis adhérente, pour un stage d'observation avec l'éthologue Hélène Roche.
Le stage s'est déroulé aux écuries de Chantemerle, une des première pensions avec paddocks sur pistes faite sur le modèle du "paddock paradise" de Jamie Jackson en France. Le principe est de faire circuler les chevaux dans des couloirs en terrain varié dont les points d’intérêts (eau, foin, etc...) sont éloignés le plus possible les uns des autres, les prairies n'étant accessibles que ponctuellement pour permettre une rotation des parcelles. C'est un cadre magnifique, où les chambres d'hôtes sont aussi bien aménagées et conçues que les paddocks des chevaux. Davina la propriétaire des lieux est d'une énergie et d'une bienveillance sans failles.
écuries de Chantemerle |
Nous étions donc une dizaine de membres de l'Association, le but du weekend était de corréler les données GPS avec des observations de terrain. En effet l'association a mené l'an dernier une étude sur les déplacements des chevaux au pré et récolter énormément de données GPS dont seuls les kilométrages ont été exploité pour le moment.
Pour cela Hélène Roche nous a fait un exposé samedi matin sur les objectifs du weekend et sur l’identification des comportements à observer. Ensuite nous avons équipé le groupe de juments de GPS et observé durant 1h30, par binômes de deux et avec les explications d'Hélène, leurs comportements. A la fin de la cession, nous avons sorti les données des GPS et cherché des corrélations entre les données et les observations.
explications d'Hélène Roche durant la première cession d'observation |
Là nous avons eu un temps de réflexion et d'échanges sur les observations. La première question que nous nous sommes posé était : comment mieux les cibler pour mieux comprendre ce qui fait la différence de kilométrage entre deux chevaux évoluant dans le même groupe et les mêmes conditions de vie ? En effet, les résultats de les résultats de l'étude GPS de l'an dernier ont montré une corrélation entre les kilomètres parcourus et la taille du pré (plus un pré étant grand, plus les kilomètres étaient importants). Cependant dans un même troupeau il y avait des différences parfois significatives entre les individus sans que ça soit lié à leur âge, leur sexe ou leur taille. Les troupeaux se déplaçant ensembles (sauf quelques rares cas qui restent isolés), la question était de savoir à quel moment les écarts de kilomètres se creusent entre les individus ? Il y avait plusieurs pistes pour répondre à cette question : les différences de caractère, de hiérarchie, de façon de manger ou de se déplacer, etc... Nous avons choisi de nous demander si les chevaux faisaient plus de kilomètres en mangeant, ceux qui choisissent plus leur nourriture par exemple, ou si les chevaux font plus de kilomètres dans les déplacements, ils se déplacent plus loin, plus vite que les autres. Dans les observations, nous pouvions différencier les deux types de marche. La première dite "marche exploratrice" permet au cheval de se déplacer de quelques pas entre deux touffes d'herbe, il a donc la tête basse, souvent il mastique. La seconde dite "marche active" dure plus longtemps et le cheval a une attitude plus active : tête haute, meilleur engagement, etc.
Cependant durant nos premières observations, nous avions eu des difficultés à différencier les deux types de marche, les différences étant rarement aussi tranchées. Nous avons donc convenu de ne plus noter les marches exploratrice, qui ont été englobé dans l'activité "pâturage", mais seulement les marches active, dont nous avons fixé le seuil minimal à trois foulées de pas.
comparaison des données GPS et observations terrain |
Le samedi après midi, nous avons refait une cession d'1h30 avec les juments en les déplaçant dans un pré pour mieux voir les comportements liés au pâturage et à la marche active. Puis nous avons sortis et analyser les données. La bonne nouvelle est effectivement nous pouvions corréler nos observations de marches actives avec les données de vitesse des GPS. Nous avons même pu retrouver et différencier des traces "parasites", par exemple quand les juments avaient levé raidement la tête (le GPS étant fixé sur la nuque) pour observer au loin ou chasser une mouche.
Une des membres de l'association a cherché à compter le nombre de pas effectué par chaque individus, en les comptant sur des cessions de 10 x 1 min. Les résultats étaient là aussi étonnants, les variations étant parfois très fortes entre différents individus.
deuxième cession d'observation des juments au pâturage |
Samedi soir, nous avons eu une présentation d'Hélène Roche autour de la thématique « Ce que le cheval comprend de l’humain ». En expliquant chaque phase de la compréhension : perception, analyse, compréhension, chacune étant bien différente de celle des humains et variant d'un cheval à l'autre selon ses sens, son vécu, sa façon d’apprendre et de réagir.
Dimanche matin, troisième et dernier session avec les hongres cette fois-ci. Nous reprenons nos observations et les GPS. A l’issue de cette matinée, Davina nous fera une visite du paddock paradise des hongres et nous expliquera sa démarche. La majorité des chevaux qu'elle accueil sont d’anciens chevaux en souffrance (physique ou morale) qui ont trouvé un lieu où se poser et vivre sereinement.
troisième cession d'observation, avec les hongres cette fois-ci |
Ce weekend a été très riche en enseignements et en rencontres. Hélène Roche dont j'avais déjà suivi un stage de clicker l'an dernier est toujours aussi passionnée et passionnante. Là le sujet était très différent des théorie de l'apprentissage, nous avons eu des informations sur des sujets tout autre, ce qui donne un aperçu de l'entendu de ses connaissances. Je n'avais jamais fait d'observation "scientifique" d'animaux, c'est un exercice très intéressant que j'ai hâte d'appliquer à Val ! Car on observe des comportements parfois tout à fait différents de quand les chevaux sont manipulés. C'est aussi une exercice qui sous son apparente simplicité et passivité (on reste assis par terre à noter des listes interminables de comportements) est bien plus complexe qu'il n'y parait. Il ne faut pas perdre le fil, ni le cheval des yeux, garder beaucoup de rigueur sur des temps longs et bien analyser les comportements sans entrer dans l'interprétation, ce qui est extrêmement contraignant intellectuellement. Juste noter "marche active" sans chercher les raisons pour lesquelles le cheval a bougé est bien plus difficile qu'on ne le croit !
J'ai aussi eu l'impression d'être plongée au cœur d'un programme de recherche en cours d'expérimentation, toutes les questions soulevées par les premières cessions permettant d'affiner les suivantes.
Les autres membres de l'association étaient aussi passionnants et les échanges pendant et entre les cessions très riches d'enseignements et de questionnements. J'ai hâte d'être à la prochaine rencontre (normalement en novembre).
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