samedi 26 octobre 2013

pieds nus : pourquoi et comment


pied nu dans la neige par Noush
Je voudrais commencer cet article en précisant que je ne suis pas une aficionado du parage naturel. C'est un mode de vie que j'affectionne particulièrement pour le cheval, mais si la ferrure peut à un moment donné apporter une solution que le parage ne permet pas, je n'hésiterais pas à référer, comme j'ai pu le faire lors de la molette tendineuse de Val (ceci dit, ça ne nous a pas apporté grand chose de ferrer mais bon).

Tout d'abord les raisons de mon choix : 

Il faut préciser que j'ai deux sites internet, un blog, je participe à plusieurs forums autour du cheval, bref je passe beaucoup de temps à lire et essayer de comprendre sur internet. Et les pro du parage naturel sont particulièrement présents "sur la toile". Alors coïncidence ou publicité, toujours est-il que ces derniers n'hésitent pas à exposer et à expliquer en long, en large et en travers leur métier. Ce qui fait que n'importe quel propriétaire lambda d'équidé a accès à une mine d'informations (pas toujours très objective) sur le sujet. A l'inverse j'ai trouvé très peu d'info sur la ferrure (manque d'intérêt de ma part ou opacité des maréchaux ferrant?).

Ayant lu sur le sujet, je savais que mon futur cheval serait pieds nus, du moins que je tenterais l'expérience. Surtout que les contraintes inhérentes au parage naturel (cheval parfois sensible, obligation de s'adapter et de ne pas pouvoir monter tout le temps, devoir faire des marches en main etc...) ne le sont pas pour moi étant donné que je travaille beaucoup à pied en carrière ou en extérieur et que je ne monte pas systématiquement mon cheval. Surtout que j'ai une utilisation très partielle de ma jument (montée 1 à 2 h par semaines grand maximum) et si un jour faut faire plus, on pourra utiliser ponctuellement des hipposandales. Généralement faites dans des matériaux souples, ce sont un peu les chaussures de rando du cheval. C'est un peu cher à l'achat (entre 100 et 250€ la paire), mais réutilisable. 
l'hipposandale jogging shoes, la basket du cheval 
Une fois dépassé les inconvénients, intéressons nous aux avantages. Je suis assez dubitative sur les arguments concernant le "naturel" de la chose, dans le sens "retour aux origines", je trouve ça très peu pertinent de comparer un cheval domestiqué et un sauvage, leurs environnements respectifs annihilant tout rapprochement possible.
Cependant semblerait qu'il y est moins de désagréments sur le long terme pour le cheval et son métabolisme à vivre pieds nus que ferré. Pieds nus le pieds est sensible (dans tous les sens du terme) aux sols. Il fonctionne en réaction aux sollicitation qu'il reçoit. Ainsi le cheval ne glisse plus, peut appréhender tous les terrains et y adaptant son allure sans se faire mal. Pieds nus, le pied est sollicité surtout si le cheval marche sur des surfaces dures ou variées. Il va donc produire plus de corne et de meilleure qualité, c'est un cercle vertueux qui demande du temps et des efforts notamment si votre cheval ne parcours pas seul une certaine distance sur des sols durs. A l'inverse un pied ferré ne reçoit plus aucune sollicitation directe, la corne va donc être moins produite et en moins bonne qualité, vous entrez ainsi dans un cercle de détérioration.

Cependant tout n'est pas glorieux dans le pied nu, c'est exactement comme si l'on arrêtait de porter des chaussures. Il est tout à fait possible pour un humain de vivre pieds nus (ça serait même parait-il meilleur), mais ça ne va pas sans douleurs lors de la transition. Cette grande exposition du pied du cheval peut être aussi être un atout. En effet, les erreurs de parage faites cause immédiatement des désagréments et des douleurs au cheval, impossible de faire subir à son cheval un parage catastrophique plusieurs années durant. A l'inverse le fer possède un effet anesthésiant très fort, qui masque toute erreur de parage sur le court et le long terme.

Un autre soucis du fer est que de nombreux maréchaux laissent les pieds parés trop longs en particulier en talon. Mais ce n'est pas un problème intrinsèque au fer, mais plutôt aux "traditions" (c'est rarement positif de rester bloquer dans de "vieilles" pratiques, surtout avec les avancées technologiques actuelles).

dissection pied cheval avec talons hauts conservés, on voit bien le déséquilibre interne
source : Michael T. Savoldi, 10° Congrès de médecine et chirurgie équine
Surtout le pied laissé nu et avec un parage approprié laisse la sole et les parties arrières dites "molles" au contact avec le sol. La fourchette, la sole et les parties internes du pied jouant pleinement leur rôle structurel en absorbant à chaque pas les chocs lié aux mouvements du cheval. C'est leur élasticité qui permet cette absorption, le pied pied s'écartant et se rétractant à chaque contact avec le sol. Les chocs ainsi stoppés ne se répercutent pas dans les tendons, os et articulations des membres, garrot et dos du cheval. 
A l'opposé,  le fer repose sur la paroi extérieur du pied et sa rigidité bloque tout mouvement du pied ainsi que la sollicitation des parties arrières du pied. Souvent, plus sollicitées ces dernières s'atrophient, deviennent sensibles puis inopérantes. Le cheval devient alors l’obligé de ses fers.

comparaison importance fourchette entre pied ferré et pied nu

Face à cela, le pied nu cause des douleurs lié à l'exposition du cheval à des terrains inhabituellement durs. Les tissus s'adaptant aux sollicitations et aux terrains sur lequel le cheval vit, il n'est pas rare que dans nos riches prés à vaches ou nos paddocks boueux et exigus, ils deviennent mous. Alors chaque sortie sur des terrains secs et caillouteux est douloureuse pour le cheval. Cette souffrance "volontaire" et surtout terriblement visible affligée au cheval est le principal argument pour rejeter le pied nu. 
Cependant il existe des solutions simples pour limiter voir enrayer la douleur ponctuelle lié à des terrains inhabituels. Commencer par les hipposandales. Ensuite il est possible d'agir sur les conditions de vie du cheval, le but étant qu'il se déplace le plus possible et sur des terrains les plus variés possibles (gravillons, goudrons, cailloux, sable, mâchefer, etc...). Un propriétaire dévoué et disponible peut jouer se rôle et sortir son cheval en main ou en selle sur des terrains variés plusieurs fois par semaine. Il existe aussi des "paddocks paradises" mis au point par Peter Ramey (un des précurseurs du parage naturel) ils ont pour but de recréer de la vie des chevaux en liberté pour les chevaux domestiques, le but étant de faire vivre les chevaux en groupe et avec une nourriture pauvre, disséminée et riche en fibre pour l'obliger à marcher le plus possible. En Allemagne, les "écuries actives" qui ont pour but de répondre à aux besoins vitaux des chevaux se développent (pour rappel : marcher plusieurs kilomètres par jour, avoir des contacts sociaux et physiques avec d'autres chevaux, et l'estomacs remplis en permanence). Toutes ces solutions permettent non seulement d'améliorer considérablement les pieds des chevaux mais aussi et surtout leurs conditions de vie.

Ensuite le comment ?
Là ça se corse, autant sur le net, les pareurs naturels sont omniprésents, autant dans la réalité c'est plutôt le vide intersidéral, bien que ça se développe petit à petit.
Aussi à l'image des ostéopathes et autres étiopathes, les pareurs naturels se retrouvent poussés par les "officiels du secteur" dans les limites de l'exercice légal. Les formations et compétences sont donc très inégales d'un professionnel à l'autre car très peu encadrées.
Il faut donc garder un œil averti pour ne pas laisser n'importe qui, faire n'importe quoi sur son cheval (aussi valable pour les maréchaux classiques vous me direz). Mais encore une fois l'avantage avec le parage naturel c'est que vous avez une base de donnée énorme en libre accès pour vous faire votre propre opinion. En plus il y a un côté DIY ("do it yourself" = "fait le toi même") qui me plaît beaucoup dans le parage naturel : rien de sorcier ou d'inaccessible, si on réfléchit et qu'on est encadré, on peut y arriver.

Conclusion :
Méfiez-vous la barbarie n'est pas toujours du côté qu'on pense, aucune pratique ne justifie de mettre un cheval dans une détresse visible et longue.
Aussi la logique d'avoir son cheval pieds nus s'inscris totalement dans la mouvance actuelle "vers plus de naturel" qui tente d'apporter à nos chevaux domestiqués un mode de vie plus adapté à leurs besoins (donc essayer de remonter leur espérance de vie à plus de 12 ans?) : vie en troupeau, dans des terrains vastes et variés, avec des aliments pauvres mais riches en fibres et plus de marche.

Pour aller plus loin sur le sujet :

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